Je fus pris d'un élan de panique... Il est vrai que je n'avais jamais révélé à qui que ce soit les raisons de notre pseudo séparation, je n'avais jamais d'ailleurs dit que nous étions séparés. Ce sont les autres qui ne voyant plus Lloyd dans mon sillage, ou observant mon air triste qui en avait tiré la conclusion que nous avions mis fin à notre relation. Seul Jared était au courant des tenants et des aboutissants de cet incident qui avait fait que Lloyd et moi même n'étions plus en osmose. J'appréciais tout de même que Amy fasse la nuance en précisant que nous nous étions disputés, ce qui n'était pas tout à fait vrai mais c'était ce que je lui avais dit. D'où mon instant de panique, que je tenais à canaliser car j'étais dans les bras de ma meilleure amie, je ne pouvais pas lui avouer la véritable nature de l'homme que j'aimais. Bien que très ouverte, je doutais qu'elle accepte ou même qu'elle comprenne la vérité, de plus Jared avait précisé que je ne devais le dire à personne, que désormais j'étais moi aussi tenue au secret comme tout le reste de la communauté magique. Je me laissais aller à cet enlacement histoire de me donner bonne figure, avant d'éclater de rire à la dernière réflexion de cette dernière. Je secouais la tête tout en levant les yeux au ciel, l'air de me demander si elle avait vraiment dit ça, et tel que je la connaissais Amy m'avait vraiment implicitement demandé si sexuellement entre Lloyd et moi ça allait... Le soucis reposait sur le fait que je ne pouvais pas lui répondre, non par pudeur puisque je pouvais discuter de tout avec elle, enfin presque tout, mais plutôt parce qu'il n'y avait jamais eu de moment aussi intime entre lui et moi. Nous souhaitions prendre notre temps, et puis notre relation amoureuse en était encore à ses débuts, au moment de sa révélation nous sortions ensemble depuis deux mois... D'où aussi mon éclat de rire parce qu'elle ignorait ce détail. Toujours est-il que cet instant me laissa un goût amer dans la bouche, car cela ne répondait pas à la

Nous avions une divergence d’opinion. Et non je ne veux pas en parler.

Je savais parfaitement que Amy respecterait mon vœu pourtant je savais que je ne pourrais pas me cacher bien longtemps derrière le couple que je formais avec Lloyd. D’une part parce que depuis trois mois, on ne pouvait pas dire que nous étions un couple, d’autre part parce que je savais que tôt ou tard les pressions pour que je refasse ma vie s’intensifieront. Moi-même je finirais par vouloir vivre de nouveau une relation amoureuse, déjà à la Saint-Valentin j’avais accepté un rendez-vous avec un inconnu. Pour ce que ça m’avait rapporté… Tout ça pour dire que j’espérais que Amy n’était pas venu aujourd’hui pour me convaincre qu’il était désormais tant pour moi d’oublier Lloyd, et je souhaitais que lui revienne à San Francisco pour avoir une discussion avec lui. En attendant je restais dans ce flou qui caractérisait notre relation depuis trois mois, je doutais même de pouvoir à nouveau avoir ce que nous avions alors. Je me devais de lancer un nouveau sujet de discussion si je voulais éviter la question de ma relation avec Lloyd mais pourtant je sentais que c‘était le moment de m‘épancher sur mes doutes…

Je voudrais juste savoir où il est.

Amy fut la première à qui j‘avais avoué que l‘appartement de Lloyd était vide de sa présence, et qu’il était parti sans dire un mot, sans prévenir qui que ce soit. Je n’avais pas été jusqu’à demander au supérieur hiérarchique s’il avait des nouvelles de son officier de policier, je me doutais qu’il avait du demander une période de congé sans solde. De plus je savais parfaitement que Ennea menait sa propre enquête, ne comprenant pas la soudaine disparition de son ami. Pour moi Lloyd avait simplement voulu faire un break avec tout le monde, enfin il faudrait qu’il m’explique tout de même. Dans mes mains je sentais que mon thé refroidissait aussi m'efforçais-je de finir ce dernier, afin aussi de me donner une certaine contenance. Ce n'était jamais agréable d'avouer sa propre faiblesse à quelqu'un, même si cette personne était votre meilleure amie, je n'avais plus eu besoin de le faire depuis que j'étais devenue amie avec Lloyd. Avant j'étais une véritable catastrophe ambulante, alors ma faiblesse faisait vraiment partie de moi, mais cela faisait presque un an que la malchance a déserté ma vie, enfin presque... Cet incident avec lui pourrait être qualifié de malchanceux. J'en avais oublié que Amy était venu dans un but précis.

J’aurais bien voulue la croire, faire comme si ce qu’elle me disait était la stricte vérité, qu’il me suffisait d’espérer pour qu’effectivement Lloyd revienne. Malheureusement je n’avais rien pour me convaincre que cela allait arriver, je commençais peut-être à perdre un peu espoir. Je relevais la tête lorsque Amy me parla de l’amour, je savais parfaitement que mon amie ne croyait pas aux sentiments amoureux, ceux qui bouleversent votre vie. Je savais que dans sa famille les relations amoureuses étaient souvent vouées à l’échec, je me doutais que Amy pensait être elle aussi incapable de connaître un jour ses sentiments qui vous tiraillent le cœur, vous faisant ressentir pleine et entière. J’avais eu tout ça avec Lloyd, je m’étais sentie vivante, attirante, admirée et aimée, tellement de choses qui avaient fait de moi une autre personne, je débordais de joie à l’époque. Aujourd’hui je serais prête à tout pour revivre ses instants de bonheur, de plénitude. Seulement je savais aussi que Amy ne pensait pas à l’amour de la même façon que moi. Cela me blessa un peu que mon couple ait été ce qui s’apparentait pour elle à une nouvelle raison de ne pas désespérer, parce que j’espérais qu’elle allait continuer à espérer. Je savais qu’un jour, un homme lui ferait tourner la tête et qu’elle n’aura d’yeux que pour lui…

Je continuais de réfléchir aux propos d’Amy, oui sans doute que Lloyd avait une bonne raison d’être parti mais rien ne l’empêchait de passer un coup de fil pour me dire où il est. Plus les jours passaient, moins je ressentais ce lien qui m’unissait à lui, comme si la fragile décision que j’avais prise avait du mal à continuer d’exister. Quand j’avais découvert que Lloyd faisait parti du monde magique, je n’avais pas eu la force de comprendre la raison pour laquelle il ne m’avait rien dit, aujourd’hui encore je ne vois que le fait qu’il m’ait menti même par omission. J’avais besoin de comprendre, de discuter avec lui après tout nous étions un couple, je considère que nous le sommes toujours… Mais lui peut être pas. Peut-être était-ce d’ailleurs la raison de son départ. Tant que je n’aurais pas de réponses je ne pourrais pas être pleinement sûr que la vie que j’avais rêvé avec lui n’avait pas lieu d’être.

Je vis Amy approcher sa main en direction de ma tasse, je me doutais qu’elle allait la prendre pour aller la réchauffer dans la cuisine. Malheureusement quand on veut faire plusieurs choses à la fois, il arrive des catastrophes, ma tasse tomba à terre et l’anse se brisa, ce qui perturba Amy.

Tu n'as pas à te donner tant de mal, tu sais combien je peux être maladroite.

Pourtant je ne comprenais pas la réaction de ma meilleure amie, c'était comme si elle avait fait quelque chose de très mal, ce qui n'était pas le cas. Certes elle m'avait pris la tasse des mains, seulement j'étais tout aussi fautive qu'elle, j'étais persuadée d'avoir lâché un peu trop tôt. Je ne tenais pas tellement à cette tasse donc je lui avouais que ce n’était pas la peine qu’elle m’en rachète une, néanmoins je la vis s’agiter dans ma cuisine, je voyais bien qu’elle cherchait à fuir mon regard. Je ne parvenais pas à savoir pourquoi, toutefois vu que notre conversation portait depuis plusieurs minutes sur Lloyd, je me doutais que c’était parce qu’elle n’était pas elle-même convaincu par ce qu’elle venait de me dire. La voir agir de la sorte était un peu perturbant, Amy n'était pas de celle qui se perturbait pour un rien, cela m'intrigua quelque peu. Elle fuyait mon regard, je le sentais bien néanmoins j'étais un peu habituée à cela, depuis que je la connaissais Amy avait quelque chose à cacher. J'ai toujours supposer que c'était par rapport à sa famille car elle parlait difficilement de celle-ci. Alors pourquoi s'agitait-elle maintenant ? Nous n'avions pas aborder le sujet...

Merci... Qu'est ce qui se passe Amy?

Elle était de retour à mes côtés, un tasse fumante à présent entre mes doigts. Je la regardais, très intriguée, je doutais d'avoir une réponse. Telle que je la connaissais elle allait surement embrayée sur un autre sujet.

Elle me tendit la tasse, que j'attrapais des deux mains pour ne pas de nouveau la renverser, mon canapé n'y survivrait pas. Il n'était pas neuf, je l'avais récupérer de l'appartement d'une amie qui avait déménagé et qui me l'avait revendu, aussi n'était-il plus d'une couleur éclatante. Heureusement il était couleur chocolat, toutefois je me chargerais de nettoyer la housse une fois que Amy serait partie. En parlant de mon amie, je reportait mon attention sur elle, assise de nouveau près de moi. Son croisement et décroisement de jambes étaient une caractéristique de stress, je penchais la tête pour l'observer, elle n'était plus à l'aise et je ne comprenais pas pourquoi. Enfin elle me parla, fuyant mon regard, je dus me mordre les lèvres en songeant que je l'avais peut-être de nouveau blessée. Je me doutais bien que cela devait lui peser que je lui parle, encore, de ma relation avec Lloyd, même si c'est elle qui avait abordé le sujet, par politesse et inquiétude je suppose. Toutefois je comprenais parfaitement les sentiments qui l'animaient, je savais de son propre aveu qu'elle n'avait jamais connu de passion aussi importante que celle que je vivais avec Lloyd, et j'étais là à étaler mes ressentiments et mes doutes.

Je suis vraiment pas une bonne copine hein...

Je posais rapidement ma tasse sur la table basse, et la prit dans mes bras pour la charrier, histoire que la bonne humeur revienne. Après quelques instants de pure folie féminine, que je nierai avoir eu si on me le demandais, Amy redevint un petit peu sérieuse ce qui m'intrigua et me rappela que ma meilleure amie était venue avec une idée derrière la tête. Mes yeux se plissèrent de suspicion et visiblement elle commençait mal, je me demandais pourquoi j'allais être furieuse. L'instant qu'elle prit pour formuler le reste de sa pensée, fut aussi celui que me suffit à imaginer tout un tas de scénarios qui dépassaient l'entendement. Cela passait d'une séance de shopping osée à une virée en dehors de l'état. Je secouais la tête pour m'enlever les idées qui s'amoncelaient dans mon esprit, puis le couperet tomba.

Non

Ce simple mot passa inaperçu dans litanie des paroles qu'elle prononçait, j'attrapais ma tasse, me levait et allait me poster devant la baie vitrée à droite de mon canapé. C'était cette baie qui m'avait fait choisir cet appartement, car elle était grande, éclairant toute la pièce et dont la clarté allait jusqu'à la cuisine en face de celle-ci. La vue qu'on avait de cet endroit n'était pas la plus belle de San Francisco mais je m'en fichais royalement parce que rien ne pourrait m'enlever cette luminosité. Pour le moment je regardais dehors sans vraiment voir ce qu'il y avait à l'extérieur, l'esprit trop occupé par les mots de mon invitée. Ce n'était pas la première fois qu'elle voulait que je fasse carrière dans la musique, c'était d'ailleurs de cette façon que nous nous étions connues, lorsque je jouais et chantait au café dans lequel je travaillais. Je ne chantais pas mes propres chansons mais Amy avait été conquise par ma voix, elle avait même fait un article sur moi, j'avais heureusement réussi à la convaincre. Néanmoins je n'avais jamais chanté mes propres chansons, laissant ma passion au placard comme je l'avais fait pour mon envie de carrière dans l'édition. Aujourd'hui elle souhaitait de nouveau m'aider à lancer ma carrière, je ne savais pas ce que je voulais mais je doutais que faire un concert soit ce qu'il y a de plus approprier. Son argument sur Lloyd me fit sourire, je doutais qu'il soit amnésique mais parfois je rêvais d'avoir dit non à Jared, parce que je n'aurais pas tout ces doutes à l'esprit. Tout aurait été effacé sans que je ne me lamente, et puis je me ressaisissais parce qu'en toute honnêteté savoir que le monde magique existait me faisait comprendre beaucoup de chose que je n'avais jamais pu osé comprendre. La perspective de jouer au P3 était très tentante car personne n'avait lancé sa carrière depuis ce club mythique, pourtant je ne me sentais pas la force de le faire.

Amy tu sais que je ne peux pas te dire oui. Je suis désolée mais c'est impossible, je ne peux pas faire ça.

Je ne pouvais pas surmonter ma peur de la scène pour chanter mes propres chansons. A aucun moment je ne m'étais retournée, ne voulant pas affronter son air déçue, je n'avais pas la force de me laisser convaincre. Parce que je sentais que je pouvais craquer et lui dire oui, non pas pour Lloyd mais pour moi-même... Pour me prouver que je pouvais y arriver.

Mon regard restait fixé sur l'extérieur, oscillant entre le bas de la rue où toute la population de mon quartier semblait s'être donné rendez-vous; la maison qui avait été construite un peu plus haut en remontant la rue, et la colline qui surplombe mon quartier. Je n'avais pas vue sur les meilleurs paysages de San Francisco, ce qui ne m'avait jamais dérangé, aujourd'hui encore moins. J'étais l'une des rares personnes à me plaire dans un quartier comme Excelsion, je savais à quoi m'attendre alors je ne m'offusquais pas de ce qui s'y déroulait. Mon immeuble n'est pas le plus sûr mais tout ceux qui y vivent se surveillent entre eux, et il est rare que des actes de vandalisme s'y produisent. C'est pour ça que j'appréciais de rester ici pourtant je savais que je ne pourrais pas vivre éternellement dans ce quartier, parce que tôt ou tard je serais obligée de déménager, que ce soit pour m'installer avec quelqu'un ou pour vivre ma propre vie. Le point essentiel était qu'un jour je n'aurais plus à regarder cette vue, en vérité j'essayais de trouver de quoi occuper mon esprit pour ne pas avoir à écouter Amy. Je savais qu'elle pensait bien faire mais franchement ça n'avait aucun sens à mes yeux, bien sûr qu'un jour il me faudrait passer outre mes appréhensions.

Bien sûr que si Amy. J'ai déjà chanté je te signale, ce ne sera pas la première fois. Seulement je.. je ne peux pas le faire.

Je sentais que ma volonté vacillait sans que je n'y puisse quoi que ce soit, je n'avais pas d'arguments pour contrer ma meilleure amie. Enfin si juste un mais il ne pesait plus très lourd dans la balance, la vraie raison pour laquelle je n'arrivais pas à chanter mes propres chansons en public. C'était un secret que j'avais enfouie si profondément en moi-même que je ne me risquais jamais à ouvrir la porte qui le protégeait. Comment avouer que cette peur était celle transmise en héritage par la mort de mon père ? Je ne l'avais jamais connu, seulement c'est de lui que je tiens ma passion pour la musique et le chant, de lui encore que me vienne la quasi totalité de mes instruments de musique. Il était tellement doué qu'il a fait le Conservatoire, le soir de sa mort il allait donner son tout premier concert, à titre personnel. Malheureusement il n'a jamais pu monter sur scène pour prouver de quoi il était capable, alors comment expliquer que ma peur venait de cet évènement. Je sentis sa main sur mon épaule, je ne l'avais pas entendue se rapprocher.

Ce n'est pas une question d'être ridicule ou non... C'est juste que je ne suis pas prête à offrir mes sentiments en pâture à une bande de... d'imbéciles.

Je lui lançais un regard en biais à sa proposition, cherchant ce qu'elle allait bien pouvoir inventer.

Que me proposes-tu ? De n'inviter que les membres de ta famille ?

Je la laissais près de la fenêtre, me dirigeais vers la cuisine tout en finissant mon thé. Une fois que j'y étais, je vis qu'elle m'observait, seulement j'avais besoin de réfléchir, elle refusais que je lui dises non... Cette fois-ci j'avais la certitude qu'elle ne se contenterais pas de cette réponse négative, elle avait été conciliante une fois seulement je doutais qu'elle le soit aujourd'hui. Amy voulait vraiment que tout le monde me connaisse, toutefois je ne savais pas ce que je voulais moi-même. Un rayon éclatant vint m'éblouir, j'oubliais souvent que mon appartement était exposé au sud ouest, mon regard fut attiré par cette luminosité qui se reflétait sur mon piano... Qu'étais-je supposée faire ?

Amy n'avait pas encore remarqué que j'observais le piano, pour je ne sais quelle raison je l'avais sorti du bureau lorsque j'avais commencé à rangé un peu plus tôt. Elle était partie dans une litanie de mots qui ne me parvenaient qu'à moitié, pourtant dès qu'elle prononça le mot "karaoké" j'ouvris grand les yeux et redescendis sur terre. J'essayais tant bien que mal de me raccrocher à ce qu'elle me disait, tout en cherchant ce que j'avais pu rater. Visiblement elle parlait d'organiser une soirée karaoké au P3, je ne voyais pas en quoi cela allait m'aider à interpréter mes propres chansons. *Amy ne croit tout de même pas que je suis une sorte de Violet Sanford, incapable de chanter en public ?* Non c'était impossible puisque nous nous étions rencontrées alors que je faisais un numéro de chant à mon ancien travail, alors elle avait forcément une autre idée en tête. Je la regardais intriguée alors qu'elle me demandait si j'avais compris où elle voulait en venir, ce qui n'était pas du tout le cas. Je n'ouvris pas la bouche, qu'aurais-je pu dire de toute façon. J’avais pris l’habitude de laisser le flot de pensées de mon amie se déverser plutôt que de songer à passer outre, je n’aurais pu qu’être submergé par la vague du tsunami oral qui sortait de sa bouche. Pourtant je devais reconnaître que cette fois-ci, j’avais mon mot à dire, car je le sentais bien que la demoiselle ne me lâcherais pas, j’avais toujours admiré sa persévérance même si aujourd’hui j’en étais la victime… Je jetais un nouveau coup d’œil à ma piano, alors même que Amy me faisait une réflexion sur le sujet, cela n’en restait pas moins ardue de lui donner une réponse franche. Je savais que si je devais en parler à ma mère ou à quelqu’un d’autre il ou elle me demanderait si je n’étais pas devenue folle de ne pas répondre oui, peut-être pas ma mère qui savait parfaitement le pourquoi de mon trouble sur scène. Seulement elle aussi me dirais que je ne devais pas hésiter et qu’il était temps pour moi de passer à l’acte. Le tout était de savoir si j’étais prête à monter sur scène. J’essayais de me donner contenance en nettoyant l’ilôt central, signe manifeste que j’étais en pleine méditation, je remerciais intérieurement mon invitée de ne pas perturber ces instants. Des cheveux s’échappaient un peu plus de ma pseudo coiffure, à chaque coup sec que je donnais mais je n’en avais cure, je m’interrogeais uniquement sur le problème que me posait Amy. Les minutes passèrent avant que je ne prenne une décision mais avant ça il me fallait poser cette question.

Pourquoi souhaites-tu organiser un karaoké ? Ce n’est pas comme si tu ne m’avais jamais entendu chanter…

Cette question me taraudait depuis que le sujet avait été évoqué, je montais sur scène mais sans pouvoir tenir tout un concert de mes propres chansons.

Voir Amy réfléchir pour une sortie ou pour une activité était une chose mais la voir se démener avec ses propres idées pour parvenir à ses fins, professionnellement parlant, était une toute autre chose. J’avais rarement eu l’occasion de connaître cette partie là de la personnalité de mon amie, il faut dire que nous nous voyons essentiellement pour décompresser et non pour parler de boulot. Même si évidement le sujet fait aussi parti de notre conversation. Aujourd’hui les choses étaient différentes, Amy avait par le passé fait abstraction d’un article pour mes beaux yeux si je puis dire, je sentais parfaitement qu’elle ne lâcherait pas l’affaire cette fois-ci. Si à l’époque j’avais réussi à la convaincre que je n’étais pas prête, maintenant je n’arriverais même pas à me convaincre moi-même. Soyons réaliste ! Depuis que Lloyd était parti, j’avais du trouver un nouvel exutoire à ma tristesse et surtout au retour de la malchance dans ma vie, sur les conseils de nombreuses personnes je m’étais tournée vers la seule chose capable de me calmer : la musique. La preuve en était que mon carnet de note était pratiquement rempli, et raturé bien sûr car j’avais eu le temps de reprendre les chansons en fonction des accords ou de la mélodie que je souhaitais mettre à tel ou tel endroit. Autant dire que j’avais de quoi faire un concert. De là à franchir le cap… C’était une chose beaucoup moins sûre ! Alors savoir que sa meilleure amie allait tout faire pour vous sortir des carcans dans lesquels vous vous étiez cantonnée toute votre sacro-sainte vie, franchement y’avait de quoi être perturbé. Savoir également que ce serait un plus pour la carrière de cette meilleure amie mettait une pression supplémentaire là où il n’y en avait pas besoin. Amy semblait vraiment vouloir trouver une idée pour me faire monter sur scène, chose qui me prouvait d’autant plus sa détermination et de là où je me trouvais, je ne pouvais que constater que l’activité cérébrale de la jeune femme battait son plein. A moment même où elle se figea, je su que j’étais perdue, que je ne pourrais lui dire non parce qu’elle avait réussi à trouver la faille dans mon raisonnement. De cela j’en étais persuadée.

Cependant je ne m’attendais pas à sa proposition, une scène libre… C’était à la fois une idée géniale mais très déroutante, toutefois cela permettrait à Amy de voir combien ma voix n’est pas si exceptionnelle que ça en fin de compte. Oui mais cela voudrait aussi dire que je lui donnais mon accord pour participer à cette scène ouverte. Et ça c’était le gros problème… J’en étais encore à réfléchir quand elle repris la parole, qui me coupa moi-même le souffle. Il était évident qu’à un moment où un autre cette demande allait surgir, je ne m’attendais nettement moins à ce qu’elle se fasse dans ce cadre là. Je n’avais jamais vraiment joué pour Amy, tout du moins pas mes propres compositions, et jusque là ça ne dérangeait personne. Je secouais la tête de négation tentant de lui faire comprendre que je ne pouvais pas le faire maintenant seulement elle me mit au supplice. Je l’avais déjà entendue chanter, elle avait une jolie voix mais n’arrivait pas correctement à tenir une note, cependant elle ne jouait pas vraiment bien d’un instrument de musique bien qu’elle ait quelques base. Or alors qu’elle touchait au piano de mon père - ce que je lui aurais interdit en temps normal, preuve que je devais être atteinte d’une quelconque maladie incurable - Amy commença à jouer une mélodie qui m’était inconnue. Après quelques secondes de son massacre musicale, j’ai réussi à reconnaître une parodie d’un chant de noël : autant dire un massacre.

Stop!

N’importe de normalement constitué aurait fait la même chose, sauf que Amy me regardait avec insistance, me faisant comprendre par là que je devais la remplacer sinon elle recommençais. La menace de sa propre phrase résonnait à mes oreilles, je n’avais donc plus le choix au risque de voir mon appartement se transformer en un je ne sais quoi catastrophique.

Je contournais donc l’ilot de ma cuisine et me dirigeais vers l’héritage paternel, lui adressant une prière. La seule personne qui m’avait écouté jouer dans cet appartement - en dehors de ma mère - était Lloyd, je me rappelais parfaitement le jour où il m’avait surprise en train de jouer. Nous n’étions pas encore en couple, il venait souvent chez moi pour manger après son service aussi lui avais-je donné les clés, il était donc rentré tout naturellement comme à son habitude pour me trouver devant mon piano. Je jetais les yeux vers le fauteuil, sur lequel traînait une veste et un vieux magasine, m’attendant presque à y trouver l’homme que j’aimais. Au lieu de cela je vis Amy qui allait s’y installer.

Amy, s’il te plait ne t’assis pas là.

L’émotion de ma voix ne pouvait pas la tromper sur la nature de ma demande, je savais aussi qu’elle comprendrait sans que j’ai besoin de lui expliquer. Les choses étaient ainsi faites et même si je continuais à vivre pour moi-même, je ne pouvais défaire la présence de Lloyd dans mon appartement comme s’il l’avait marqué de son empreinte. Je fixais mes yeux emplis de tristesse dans ceux de mon amie… Oui elle avait compris. Je détournais le regard, pris une profonde inspiration et positionnais mes doigts sur le clavier. Je savais parfaitement quelle chanson jouer, comme si cette dernière se tenait tapie dans mon esprit, prête à faire le grand saut pour s’ancrer dans ceux des autres, pour plonger au fond de l’âme des autres. Pour ma part elle ne devait plonger que dans une seule autre âme. Je sentis Amy qui s’installait non loin de moi, je fis abstraction de sa présence et me lançais.

If Your Missing

Here I am Red high heels Yellow dress Perfect nails Lips like velvet Don’t you want me, baby? I’ve been here and back again It never answers anything Where was I when they handed out the knowing you are loved? Don’t it get lonely out there, little darling Well come on home I’ll be here with open arms To hold you When you arrive I’ll be here with open arms To show you Where you belong If you’re missing come on home Been undone I’ve seen it all Still somehow I refuse to kick this carnivore to the wall Traveled here a thousand years It’s a wonder my heart still hears and beats and feels It does anything at all Don’t it get lonely out there, little darling Well come on home I’ll be here with open arms To hold you When you arrive I’ll be here with open arms To show you Where you belong If you’re missing come on home Don’t it get lonely out there, little darling Well come on home I’ll be here with open arms To hold you When you arrive I’ll be here with open arms To show you Where you belong If you’re missing come on home

Me voila Hauts talons rouges Robe jaune Ongles parfaits Levres comme du velour Ne me veux-tu pas, bébé ? J'ai ete ici et encore de retour Ca ne reponds jamais rien Où étais-je quand ils ont raconté que tu étais aimé ? Ne te sens tu pas seul la bas, petit chéri Bien, rentres a la maison Je serai la les bras ouverts Pour te tenir Quand tu arrive Je serai la les bras ouverts Pour te montrer Où tu appartiens Si je te manque rentres a la maison J'ai été defaite J'ai tout vu Je refuse toujours de toutes façons de frapper cette carnivore contre le mur Voyagé ici mille ans C'est une merveille que mon coeur guerisse toujours et batte et ressente Ca ne faisait rien du tout Ne te sens tu pas seul la bas, petit chéri Bien, rentres a la maison Je serai la les bras ouverts Pour te tenir Quand tu arrive Je serai la les bras ouverts Pour te montrer Où tu appartiens Si je te manque rentres a la maison Ne te sens tu pas seul la bas, petit chéri Bien, rentres a la maison Je serai la les bras ouverts Pour te tenir Quand tu arrive Je serai la les bras ouverts Pour te montrer Où tu appartiens Si je te manque rentres a la maison

Je laissais la dernière note en suspend comme pour retenir mes paroles. je n'osais pas me retourner. J'avais si longtemps conserver pour moi mes propres chansons qu'aujourd'hui j'avais peur de savoir quel impact elles pourraient avoir sur les autres